Romaric Briand a écrit:Moi, je le dis comme je le pense, ces volontés de Néant sans Sens m'énervent au plus haut point. Ma réponse est donc très certainement hors-sujet et au limite du principe de charité. Laissez-moi me fâcher un peu, j'en ai pas souvent l'occasion. ^^
Pas de souci d'autant que le fait de rester ouvert au dialogue t’honore (je serai ravi d'en discuter lors d'un éventuel podcast si l'occasion se présente (1)).
Je vais d'abord abonder dans le sens de Fabien qui parle du temps nécessaire à la pratique canonique de Sens. Pour notre groupe de joueurs, Sens est de très loin notre jeu de l'année 2013. Je pense parler pour nous 4 en disant qu'il représente en gros la moitié de nos parties depuis mars (le début de notre campagne). Il s'agit d'une pratique que nous ne pouvons pas vraiment partager avec nos autres amis rôlistes (parce que bon, on sait tous que les discussions qui commencent par "ouais on est en train de jouer à tel jeu avec machin et machine, c'est cool parce que bla bla bla" qui ne se terminent pas par "tu devrais vraiment essayer, viens à notre table lundi", bah c'est vite chiant). Côme a bien essayé d'en expliquer l'intérêt lors de Radio-Rôliste mais a t'il vraiment réussi ?
Le caractère dirigiste de l'intrigue n'est pas un défaut en soi mais je ne me vois pas revenir au jeu dans cette même configuration. Quand nous aurons terminé l'hexalogie, qui aura durablement marqué 2 ou 3 années de notre vie rôliste, il ne nous restera que des souvenirs. Quand nous en rediscuterons tous les 4 dans 10 ans, on ne pourra pas se dire "tiens si on se faisait un retour dans Sens ce soir", on ne pourra que discuter de nos parties en passant pour des vieux cons auprès de nos gamins !
J'ajoute que je n'ai pas du tout honte de Sens et que je ne doute pas de Sens : Cosmo. Mon reproche principal envers Sens : Mort c'est justement que les révélations arrivent trop tard (ce qui rend Mort trop similaire à Renaissance). Revenir sur Séléné en étant capable de disputer la narration à Sens je trouve que c'est un pitch formidable.
Je suis par contre un grand amateur des œuvres "fractales (2)" qui réunissent plusieurs œuvres indépendantes qui se suffiraient en elles-mêmes mais qui apportent quelque chose de plus une fois réunies (un exemple étant la trilogie de films de Lucas Belvaux qui réuni une comédie, un drame et un thriller en faisant se croiser les personnages, chaque film vaut le coup d'être vu seul mais éclaire certaines scènes des autres films). Je trouve formidable qu'en zoomant sur une partie de Sens on trouve Néant, jeu qui fait oeuvre à lui seul.
Enfin, et pour le coup je vais être carrément polémique mais je trouve qu'on a perdu quelque chose avec le "System does matter". Quand je commençais le JDR je faisais n'importe quoi avec n'importe quel jeu, quitte à tordre considérablement son système. Je viens de l'école Vampire, jeu qui se prétend adapté à tout mais n'est en réalité adapté à rien, et à chacune de mes parties je devais créer un nouveau jeu pour réussir à soutenir mon idée de scénario.
J'ai plein d'expériences de jeu étranges datant de cette époque. J'avais transformé INS/MV en un jeu semi-GN avec 2 MJs et deux équipes cherchant à s'éliminer (ce que rien ne permet de faire dans le système original). Dans le même genre j'avais organisé une campagne en temps réel de Cops (là encore j'étais dans la contradiction avec le système).
D'un côté c'était un peu laborieux mais d'un autre côté cela mettait le game-design a portée de tous. Depuis le System does matter il faut soit abandonner les prétentions de game-design soit écrire un jeu. Soit jouer à Sens : Néant soit écrire Prosopopée. C'est un peu rude, nous ne sommes pas tous Frédéric Sintes !
Je pense qu'il y a un juste milieu entre le fait de faire n'importe quelle partie avec n'importe quel jeu (j'ai comme toi eu mon époque ou j'adaptais n'importe quoi au Storytelling System ce qui était un peu absurde) et le fait de s’interdire de toucher aux jeux préexistants. Avec l'Apocalypse World de Vincent Baker, un mouvement de "hack" est en train de se diffuser dans le milieu indie US.
Des créateurs de jeux décident d'étudier un système pour l'adapter, ce qui les amène à comprendre ses objectifs et à en extraire des éléments. Je trouve que la démarche respecte l'idée que le Système est important et que l'on gagnerait à l'envisager plus sereinement (même si l'auteur garde évidemment le droit d’interdire la diffusion de hacks).
(1) Bon il faudra d'abord que je t'achètes le bouquin de Sens Néant discrètement sans éveiller tes soupçons. Si lors de la prochaine convention Eclipse tu croises "un Steven K" affublé d'une fausse barbe qui vient t'acheter un exemplaire de Sens : Néant, ça sera sans doute moi qui essayerai de t'acheter le jeu sans dévoiler mes traîtresses intentions.
(2) Les plus calés en mathématiques me feront remarquer que ma comparaison est imparfaite, tant pis.